Déculture et déconfiture, Laurent Tixier

J'ai eu la chance de le rencontrer et d'échanger avec lui... Un artiste comme il en existe désormais peu : un pur et dur, avec une foi inébranlable en l'art, qu'il croise comme le fer d'ailleurs, un homme à l'esprit partageur, bienveillant et éveillé à l'excès, par ces temps d'obscurantisme, de mercantilisme et de consumérisme outrancier. Il signe là un essai qui se veut parfois pamphlet, intelligemment argumenté et qui pose la question : Qu'est-ce que la culture ? Et quel regard nos institutions lui porte-t-elle ? Par cet extrait choisi, voici un petit état des lieux, histoire de vous inviter à lire cet ouvrage qui sort des sentiers battus... Je n'ai pas son talent mais les mêmes aspirations quant aux arts croisés, la culture et la langue des oiseaux, c'est pourquoi je lui devais cet hommage sur ce blog...

Fran Nuda

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Page 20 : L'inspire, c'est ce que l'on prend, l'expire, ce que l'on restitue. l'homme de l'art saisit pleinement le sens de cette phrase.

Mais en dehors du fait que, bien souvent, les services administratifs font la météo dans les institutions, à l'insu du politique, nous avons aussi l'impression que les grands appareils se sont donnés le mot : Aucune prise de risque, quitte à perdre du temps.
A ce titre, qui n'a pas entendu au sein de l'administration, et de manière récursive, la fameuse phrase : " Il est urgent d'attendre".
Ces comportements sont, on ne peut plus, " chronophages".
C'est faire fi du temps que l'on tue, car il prend un jour sa revanche.
Dans ce contexte de frilosité chronique, que pouvons-nous espérer ?
Ce qui est le plus accablant dans ce scénario, c'est qu'au prix d'efforts considérables, malgré tout, chaque artiste s'essaie à des propositions. Et lorsqu'en face on n'y voit qu'un atout mineur, c'est d'autant plus difficile.
On ne s'improvise pas chorégraphe, musicien, metteur en scène, auteur...
Alors évidemment, pour l'homme de l'art et de la culture, aborder l'aspect culturel avec des décisionnaires relève de manière répétitive d'un vrai parcours du combattant.
Car les élus ne voient, bien souvent, d'intérêt, dans la création d'une œuvre ou d'un évènement artistique et culturel, que la seule perspective intéressante que pourrait produire une bonne " com " en satellite du projet.
Pourvu que ledit projet soit d'une nature contrôlable.
En aucun cas, l'audace ne trouve un écho favorable, pourtant attendu par un public en demande de qualité et de nouveauté.
N'en déplaise à ceux qui considèrent comme piètre et limité leur public potentiel.
D'ailleurs, il arrive que la communication qui s'exerce autour des évènements coûte parfois bien plus cher que l'évènement lui-même, ce qui est un pur non-sens.

Aujourd'hui, la culture est reléguée, chaque jour, un peu plus aux plans inférieurs, et la question qui se pose est la suivante : la culture ferait-elle peur ?
Tout comme l'air, on ne se l'accapare pas facilement.
La culture est imprévisible, insaisissable, et toujours en mouvance.
La culture se nourrit de l'air ( voire de l'ère ) du temps, et il faut investir dans un temps pour soi afin de capter les meilleurs éléments provenant des mondes subtils.
Le temps, c'est ce qui manque, généralement, aux femmes et aux hommes politiques. Toujours très occupés.
Une personne qui n'a  jamais le temps peut passer à côté de l'essentiel.
Le temps qu'il s'offre, permet, dans le silence et le calme, à l'artiste, de puiser son inspiration. Que l'exécutif s'en inspire.
Mais que nous dit le dictionnaire concernant l'inspiration ?
Inspiration se traduit comme étant d' "influence surnaturelle par laquelle l'homme aurait la révélation de ce qu'il doit dire ou faire ".

Comment ne pas s'apercevoir que c'est bien  en développant une culture de qualité, et pour tous, que le pays sortira de ses ornières.
Il n'y a pas besoin d'être visionnaire pour se rendre compte de toute l'utilité et des avantages qui adviendraient si l'on offrait des programmes culturels et artistiques de qualité. La division latente du pays provient aussi de l'absence de culture qui, seule, permet l'éveil, et par voie de conséquence, la compréhension ( clarté et intelligence ). Et le roi Salomon ne disait-il pas : " L'art ne se nourrit que de l'intelligence du cœur ".
Évidemment, lorsque l'on parle de culture, il n'y a rien de palpable ni de tangible sur les plans horizontaux. Et nous avons tous, plus ou moins à un moment ou un autre, considéré qu'injecter des fonds dans la culture revient à orienter les énergies dans des branches mortes. Mais il nous faut raisonner autrement, à présent. Même si l'altruisme n'a pas vraiment cours de nos jours.

[...]

 Fin de l'essai

Il nous faut des routes, disent les élus ? Je réponds, certainement pas en priorité. Il nous faut, d'abord, de l'oxygène et de le culture.
aussi recentrons-nous sur l'essentiel.
Nous le savons tous. Tout a déjà été créé.
Mais tout doit bien provenir d'un point central, où tout est beauté, intelligence et générosité ? Non ? Un point central où les meilleurs idées émanent.
Car... Un point c'est tout !

Laurent Tixier, Post des évènements de 2016



Commentaires

  1. Oxygène et culture , voilà la priorité des combattants .
    Excellent et écrit très riche . Bravo
    Merci Fran de nous avoir fait découvrir Monsieur Tixier

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  2. J'ai lu et relu ce texte.
    Mr TIXIER parle bien, écrit bien.
    Il décrit, parfois avec évidence, la situation avec beaucoup d'émotion, de coeur et d'amour pour l'Art, car il la connait bien.
    Son propos aborde plein de sujets intéressants et importants, qui m'interrogent et qui m'incitent à écrire ce qui suit :

    La culture et l'Art : est-ce la même chose ? nous nous cultivons de l'Art... mais de bien d'autres choses aussi. La culture est universelle mais pas uniquement artistique. Alors, concentrons nous sur l'Art.
    L'Art, le beau, l'émotion : oui c'est le ressenti d'un instant, tel un photographe qui saisit "l'Instant" précis où il faut saisir "le" moment. c'est vrai pour l'artiste, mais pour celui qui découvre une oeuvre. ça parle ou ça ne parle pas. C'est presque instinctif.

    L'Art et l'Administration : est-ce possible ? c'est antinomique pour moi, même si il existe un Ministère dédié. Il est regrettable que le budget alloué à ces services est quasiment au dernier rang des lignes budgétaires du budget de l'Etat.
    L'Administration fait avec ce que le politique lui donne. C'est le politique qui vote le budget au Parlement. L'Administration n'a pas tout pouvoir, le politique est bien là.

    L'Art et la Politique : oui, c'est bon de se montrer au vernissage et de servir son image. Mais l'intérêt pour l'Art ??? c'est un outil pour toucher et acquérir un certain public. Quant à servir la cause de l'Art... c'est plus compliqué.
    Alors il y a des actions phares qui moussent beaucoup sur le moment, mais qui au fond ne rapportent que peu d'effets.

    L'Art éphémère a le vent en poupe en ce moment dans beaucoup de villes ; je ne sais pourquoi. C'est l'Art du moment.

    L'Art n'est pas porteur... et pourtant... si on voulait bien se donner la peine de se pencher sur ce moyen d'expression (tout art confondu), on se rendrait compte des capacités et de l'importance d'objectiver ses avantages.

    Je comprends l'exaspération, le constat de Mr TIXIER... Quelle est la solution ?

    L'Art, le silence et le calme : bien sûr que l'artiste a besoin de se retirer pour laisser éclore son émotion, son inspiration...
    Mais tout être a besoin de calme et de silence, surtout dans ce monde tragique d'incompréhension dans lequel nous vivons.
    Les hôtelleries d'abbayes se remplissent de plus en plus de personnes qui ont besoin de sortir du monde pour RESPIRER, SOUFFLER, et se ressourcer spirituellement.
    Le calme et le silence ne sont pas l'exclusivité de l'artiste, c'est l'exclusivité de tout être qui a une vie intérieure et qui a besoin de se retrouver, de se trouver ou de se chercher.
    Serait ce le signe que nous soyons tous des artistes qui s'ignorent (j'y crois assez).

    L'Art et la Société : nous y voilà... nous en faisons tous partie. Nous nous laissons bousculés, maltraités, formatés parfois malgré nous... mais comme la nature réconforte et ressource, l'Art permet de nous évader, de nous faire rêver, et aussi de nous faire réfléchir.
    Il nous inspire aussi, il nous soulage, il nous répare, il nous apaise...

    Alors que faire pour promouvoir l'ART ?
    Je n'ai aucune solution à mon humble niveau.
    Je ne suis capable que d'admirer (ou de ne pas admirer).

    Mais s'il vous plait, ne démissionnez pas vous tous les artistes. Car vous avez un don... vous l'avez exploité, vous recherchez toujours et encore, vous êtes en recherche permanente d'inspiration, d’innovation.
    L'Art permet aux autres d'aimer, et d'explorer en eux leurs capacités de réflexion, d'observation et d'émotion.
    Bien sûr, il faut pouvoir vivre de son Art et je comprends bien que c'est le noeud aussi du problème, et qu'une promotion sociétale de l'Art pourrait aider.

    Alors, faisons ler êve que l'ART devienne un jour une cause nationale !

    MERCI LES ARTISTES...

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    1. Il faudrait une prise de conscience individuelle pour un intérêt collectif. Mais là, autant dire que la prise de hauteur et de recul necessaire peut demander des annees... pour un resultat qui ne sera sans doute pas à la hauteur du l effet escompté.
      Je ne crois qu' à des initiatives individuelles mais collectives à des niveaux humbles dans un premier temps. C est déjà cela... et forcément l échelle étant moindre l humanité, la chaleur véhiculé devraient être plus sincères et profondes.

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  3. Lu, relu. Magnifique texte qui je vois a beaucoup inspiré Patricia et Sylvie. J'abonde dans leur sens

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